L'Éditorial des marchés - 8 février 2023

La crise du porc au Québec : pas de panique pour le maïs
Par : Ramzy Yelda, analyste principal des marchés, PGQ
L’industrie du porc au Québec traverse une crise sans précédent. Les déboires d’Olymel font la manchette : perte nette cumulative de 390 millions de dollars en 2021 et 2022, réduction des porcs abattus de 38 % sur deux ans, survie incertaine des abattoirs, etc. Les raisons de cette débandade sont diverses et bien connues : baisse de la demande chinoise, prix élevé des grains, problèmes de recrutement dans les abattoirs, expansion très coûteuse des activités d’Olymel en 2019 juste avant l’effondrement du marché du porc, etc.
Au Québec, la demande locale de maïs pour l’alimentation animale est estimée à environ 2,5 millions de tonnes par an, pour une production de maïs qui a été de 3,4 Mt en moyenne au cours des cinq dernières années. Les trois quarts de notre récolte de maïs servent donc à nourrir les animaux au Québec. On peut estimer que la moitié de notre production de maïs sert à nourrir les porcs. Par conséquent, certains paniquent déjà à l’idée que la crise du porc va dévaster le marché local du maïs.
Bien entendu, lorsque ton premier client est en crise et que sa demande baisse, cela entraîne des répercussions sur ton marché. Mais il n’y a pas de raison de paniquer. D’abord, la baisse de la production de porcs va être étalée, et son impact sur la demande locale de maïs sera ressenti principalement en 2023-2024.
Deuxièmement, on a la chance au Québec d’avoir les ports du Saint-Laurent pour l’exportation des grains. Ces ports, qui ont une très grande capacité de manutention, ne fonctionnent pas à pleine capacité. L’Europe est le principal importateur de maïs québécois en raison du fret maritime avantageux. Or, il se trouve que les importations européennes de maïs sont en forte hausse cette année en raison d’une récolte médiocre en 2022. L’Europe pourra donc absorber sans problème notre surplus de maïs.
Troisièmement, l’industrie porcine est intrinsèquement cyclique. Je ne suis pas un expert dans le domaine, mais je peux déjà vous dire que la production de porcs rebondira éventuellement, peut-être aussitôt que 2025 (?).
Alors, me direz-vous, il n’y a vraiment pas de quoi s’inquiéter pour le maïs au Québec ? Je n’irai pas jusque-là, la situation est sérieuse et les impacts sur la demande locale du maïs se feront sentir surtout en 2023-2024. C’est peut-être le bon moment de revoir votre planification des semis pour ce printemps. Semer plus de soya et moins de maïs pourrait être une bonne stratégie pour la prochaine récolte…
De temps à autre, au gré des besoins et de l’actualité, j’écrirai un éditorial sur un sujet touchant la commercialisation des grains. Cet éditorial reflètera une opinion personnelle qui ne sera pas nécessairement représentative de la position officielle des Producteurs de grains du Québec.
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