Les producteurs de grains québécois demandent une révision urgente de l’application de la tarification carbone
Longueuil, le 27 novembre 2025 – La divulgation des résultats de la 45e vente aux enchères des marchés du carbone Québec-Californie révèle que le prix des unités d’émission est resté pratiquement le même par rapport à la mise aux enchères d’août 2025. Pour les producteurs de grains du Québec, cela signifie que, cette année encore, ils devront défrayer des coûts importants liés à l’achat de droits d’émission associés à l’utilisation d’intrants énergétiques — des dépenses dont une large part découle directement de l’usage incontournable du diesel agricole.
Au cours des dernières années, les producteurs de grains ont versé environ 150 M$ au Fonds d’électrification et de changements climatiques (FECC) via la tarification carbone, ce qui représente près de 30 % des contributions du secteur. Pourtant, moins de 2 % des sommes du FECC destinées aux initiatives climatiques ont été attribuées au secteur des grains.
« Nos entreprises sont parmi les plus affectés par les aléas climatiques, mais ce sont aussi celles qui reçoivent le moins de soutien pour y faire face. On contribue largement au financement du FECC, mais on n’a pas accès aux moyens nécessaires pour s’adapter ou réduire nos émissions. Ce déséquilibre doit être corrigé », affirme le président des Producteurs de grains du Québec (PGQ), M. Sylvain Pion.
Notre organisation est par ailleurs préoccupée par le projet de loi no 7, Loi visant à réduire la bureaucratie, à accroître l’efficacité de l’État et à renforcer l’imputabilité des hauts fonctionnaires. Une mesure de ce projet de loi permettrait au gouvernement de transférer les surplus accumulés de 1,7 milliard$ du Fonds d’électrification et de changements climatiques (FECC) vers le Fonds des générations et le Fonds des réseaux terrestres. Nous appuyions le principe de mieux diriger ce surplus, mais nous espérons fortement que les producteurs de grains du Québec reçoivent d’abord leur juste part, à la hauteur de leurs contributions, avant toute redirection du surplus.
La tarification carbone, dans sa forme actuelle, entraîne des effets contre-productifs dans le contexte agricole actuel. Les intrants énergétiques comme le diesel, le propane et le gaz naturel sont essentiels aux opérations agricoles et les producteurs ne disposent d’aucune alternative technologique viable à court terme.
« On veut faire partie de la solution, mais il faut reconnaître que nous n’avons pas encore accès à des tracteurs électriques, à des séchoirs à grains utilisant des énergies non fossiles ou à des équipements capables de remplacer nos machines actuelles. On nous impose une facture sans nous donner les outils », ajoute M. Pion.
Pour certaines exploitations, la facture liée à la tarification carbone peut atteindre près de 10 000 $ par année. Ces coûts limitent la capacité d’investissement des fermes, alors même que l’empreinte carbone de la production de grains provient majoritairement des sols et que les efforts devraient se concentrer sur l’amélioration des performances agronomiques, économiques et environnementales. En assumant seuls ces charges supplémentaires, contrairement à leurs homologues d’autres provinces qui bénéficient d’exemptions ou de remboursements, les producteurs québécois se trouvent injustement pénalisés et peinent à adopter des pratiques et à intégrer de nouvelles technologies améliorant la productivité, compétitivité et la résilience climatique.
Dans ce contexte, les PGQ demandent que la tarification carbone ne s’applique pas pour les énergies fossiles utilisées en agriculture et que les fermes obtiennent un remboursement des sommes défrayées jusqu’à maintenant en lien avec cette tarification pour pouvoir les investir dans des projets pour améliorer leur performance agronomique et économique.
Les mesures annoncées dans la récente mise à jour économique du gouvernement sont un pas dans la bonne direction et démontrent que le gouvernement comprend qu’il doit y avoir des changements. Cela dit, les PGQ espèrent que le prochain budget provincial apporte enfin une solution durable et équitable à la problématique de la tarification carbone appliquée au secteur agricole. Il ne faut pas perdre de vue qu’il est ici question d’agriculture et, par extension, d’alimentation — un secteur au cœur de la capacité du Québec à nourrir sa population.
« Des objectifs climatiques ambitieux doivent s’accompagner de moyens réalistes. Si on veut une agriculture québécoise résiliente, compétitive et présente dans l’avenir, il faut que les politiques climatiques tiennent compte de nos réalités et nous soutiennent dans nos efforts », conclut M. Pion.
Les Producteurs de grains du Québec
Les Producteurs de grains du Québec (PGQ) représentent près de 10 000 productrices et producteurs présents dans toutes les régions du Québec. Ils produisent et commercialisent des grains de céréales, dont le maïs, le blé, l’orge et l’avoine, ainsi que des oléagineux, tels que le soya et le canola. En plus d’être à la base des autres productions, ces aliments contribuent à une saine alimentation humaine ainsi qu’à l’épanouissement de l’économie québécoise. Cultivés sur plus d’un million d’hectares de terre, ils génèrent un chiffre d’affaires annuel de 2,2 milliards de dollars (2023), faisant de la production de grains le 2e secteur agricole en importance au Québec. La production et la transformation de grains représentent ensemble près de 20 000 emplois dans la province.
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Renseignements
Maryanne Dupuis